Rencontre avec M. Jean-François EGRON

La RERL rencontre Monsieur Jean-François EGRON, Vice Président chargé du Handicap en Gironde, afin d’évoquer la Prestation Compensatrice du Handicap (PCH), plus spécifiquement en Gironde. L’échange se porte principalement sur les nombreux restes à charge non considérés par la PCH, notamment pour les employeurs particuliers en situation de handicap. Le Conseil Départemental peut-il répondre localement à la problématique ? Comment nous aider à porter le sujet ?

Présents :

Préambule

Monsieur Alex M. S. fait un état des lieux de la situation en service prestataire, en service mandataire et en emploi direct. Les problématiques évoquées au cours de sa présentation sont illustrées par quelques témoignages concrets de personnes présentes lors de cette rencontre.

Monsieur EGRON se présente et nous informe de sa collaboration avec Madame Wyame BENYACHOU, présidente de la CDAPH. La question des restes à charge a fait l’objet de discussions à plusieurs reprises au sein du département.

Les contrôles des agréments

Monsieur EGRON revient d’abord sur la question des contrôles, évoqués lors de la présentation. Il explique que les contrôles des organismes privés ne relèvent pas du département, même si des contrôles de structures de l’enfance et de la petite enfance ont déjà été effectués. Il semble donc que des structures qui relèvent du handicap devraient aussi être contrôlées au vu des témoignages apportés par le collectif. Il lui semblait que les prestations étaient de qualité. Monsieur EGRON rappelle aussi que la Gironde est l’un des départements qui engage la plus forte somme au niveau de la PCH.

Monsieur Alex M. S. confirme et reconnait que notre département a une politique particulièrement favorable au handicap. Cette constatation ressort à travers les témoignages recueillis par le collectif.

Les restes à charges du particulier employeur, une responsabilité de l’État ?

Madame Sana B. interroge Monsieur EGRON sur le positionnement du Département sur la question des restes à charge.

Monsieur EGRON se dit favorable au financement des restes à charge sur le principe, mais se dit contraint par les budgets de l’état « trop  serrés ». Le financement des restes à charge est donc, pour Monsieur EGRON, une responsabilité de l’état. Il y aurait également un travail d’analyse et d’organisation à faire sur la mise en œuvre du financement car il pourrait y avoir trop de dépenses d’un coup (il évoque le cas d’une personne qui a dû licencier 7 salariés).

Monsieur Alex M. S. rappelle que le positionnement du collectif est le même, à savoir que la décision doit se faire par les législateurs. Le collectif avait aussi contacté l’Association des Départements de France, mais la demande est restée sans réponse. Nous demandons donc un soutien de Monsieur EGRON pour une rencontre.  Monsieur EGRON nous informe alors que le président du Conseil Départemental de la Gironde, Monsieur GLEYZE est membre de l’Association des Départements de France. Le collectif s’engage donc à le contacter.

Madame Maria T. demande alors quelle solution peuvent-ils apporter sur du court terme pour faire face à ces situations et donne pour exemple son cas personnel. Monsieur EGRON l’invite d’abord à contacter une assistante sociale. Cela avait déjà été fait sans qu’aucune solution ne lui soit proposée. Elle est alors invitée à envoyer un mail à Monsieur EGRON afin qu’il puisse voir comment elle pourrait être aidée par la Direction Solidarité Gironde. Pour l’heure, aucune aide financière, même à titre exceptionnel, n’est prévue pour ce type de situation.

L’emploi direct, des économies pour les Conseils Départementaux ?

Monsieur Alex M. S. rappelle que l’emploi direct coûte moins cher que le prestataire et que si par contrainte financière les bénéficiaires de la PCH devaient passer en service prestataire, cela serait difficilement soutenable par les départements sur le plan économique. De même que les services prestataires n’auraient pas les ressources humaines suffisantes pour répondre aux besoins des bénéficiaires.

Madame Sana B. rappelle ainsi le cas de Madame Maria T. qui a aujourd’hui des charges ponctuelles (frais de licenciement pour inaptitude suite à un accident du travail) qui s’élèvent à 14 000€ euros. Madame Maria T. est employeuse depuis plus de 10 ans et c’est la première fois en 10 ans qu’elle doit faire face à un reste à charge aussi élevé. Le Conseil Départemental ne lui propose aucune solution pour payer cette somme. Elle commence ainsi à se sentir contrainte de passer en service prestataire. Pourtant, avec son plan d’aide de 730H/mois, le Conseil Départemental dépenserait plus de 54 000€ supplémentaire par an si Madame Maria T. devait passer en service prestataire.

Monsieur EGRON insiste sur le manque de finance des départements pour soutenir les employeurs, et évoque des demandes de salariés socio-médicaux et socio-éducatifs pour une revalorisation de salaire. Madame B. Sana recentre le débat sur les restes à charge en évoquant à nouveau le cas de Madame T. Maria, mais aussi le cas de Madame Sophie P., bénéficiant d’un plan d’aide de 730 H/mois et faisant appel à un service prestataire. Si Madame Sophie P. repassait en emploi direct (ce qu’elle ferait sans la problématique des restes à charge), le Conseil Départemental ferait des économies de plus de 54 000€/an. Ainsi, le collectif ne comprend pas bien en quoi le financement des restes à charge serait une charge financière importante. Madame Jenny M. suggère de réinvestir les sommes non dépensées par le fait que les bénéficiaires sont en emploi direct pour financer les restes à charge.

Pour Monsieur EGRON les démonstrations financières ne sont que théoriques. Il explique avoir été confronté à des demandes de financements de restes à charge allant de 16 000€ à 35 000€. Monsieur Alex M. S. rappelle qu’il ne s’agit que de dépenses ponctuelles et pas toujours réalisées. Ainsi des économies réalisées par système de cagnottes par exemple permettraient le financement de ces frais ponctuels.

La nécessité d’un travail collaboratif : Citoyens / Départements / Législateurs

Monsieur EGRON rappelle la nécessité  des services prestataire pour les personnes qui ont du mal à gérer le travail administratif nécessaire à l’emploi direct. Il évoque une demande d’employeurs en difficulté, qui consisterait à créer un « groupement d’employeurs » qui se chargerait de cet aspect administratif. Madame Sana B. rappelle qu’il existe déjà des services mandataires dont c’est le travail. Nous nous entendons sur la nécessité des trois modalités de l’aide humaine pour répondre aux différents besoins. Monsieur EGRON s’engage à faire avancer le débat et obtenir une réponse politique et structurelle sur la question des restes à charge.
Pour Monsieur EGRON, il y a un vrai problème légal. Il faudrait en effet travailler ensemble dans le but d’établir une stratégie politique pour faire modifier la loi et ainsi légiférer sur ces restes à charge.
Monsieur Alex M. S. suggère alors de travailler conjointement départements/citoyens, avec l’Association des Départements de France afin de défendre ce sujet des restes à charge face au gouvernement.

Monsieur EGRON soutient la démarche citoyenne du collectif et se montre ouvert à un travail collaboratif.

La participation du collectif à des ateliers de réflexion organisés par le département

Monsieur EGRON informe le collectif de la relance de l’opération 100% Inclusive et suite à laquelle le président du conseil départemental annoncera en Octobre 2022, les mesures qui seront prises. Monsieur Alex M. S. demande ainsi à participer à l’opération 100% Inclusive.
Un mail sera donc envoyé pour demander à participer à cette opération. Monsieur EGRON s’engage également à voir auprès de la MDPH si le collectif peut participer à des ateliers afin de travailler sur la problématique des restes à charge.

Perspectives

  • La République en Roues Libres :
  • Relancer l’Association des Départements de France pour sensibiliser aux problématiques de la PCH et des restes à charge du particulier employeur
  • Contacter M. Jean-Luc GLEYZE, Président du conseil départemental de la Gironde, membre de l’Association des Départements de France
  • Solliciter l’Association des Départements de France pour sensibiliser aux problématiques de la PCH et des restes à charge du particulier employeur
  • Poursuivre la campagne de sensibilisation auprès d’élus locaux, des autres départements de France et des médias
  • Envoyer une demande de participation à Gironde 100% inclusive
  • Madame Maria T. enverra un mail sur sa situation
  • Monsieur Jean-François EGRON :
  • Faire le lien entre le collectif, Monsieur GLEYZE et l’Association des Départements de France
  • Voir avec la MDPH si le collectif peut participer à des ateliers

Annexe 1 – Exemple de situation

Voici un exemple de situation expliquant en quoi les démonstrations financières ne sont pas que théoriques. Ce qui suit a aussi pour vocation d’expliquer en quoi il est possible d’avoir une grosse dépense ponctuelle qui aurait pu malgré tout être amortie si elle avait été anticipée.

Prenons l’exemple d’un salarié à temps plein (174 heures) en contrat depuis le 01/01/2014 et licencié le 01/01/2022 pour motif de déménagement de l’employeur.
Son contrat aura donc duré 8 ans. Son indemnité de licenciement est calculée comme suit :
  • 1/4 de mois de salaire (soit 1/12e de la rémunération annuelle) par année d’ancienneté pour les 10 premières années.
Considérons que 1/12e de la rémunération annuelle correspond au dernier mois de salaire brut, considérons aussi que le salaire soit resté le même sur la période (en réalité, il y a de légères fluctuations que nous ignorons pour une meilleure lisibilité du calcul).

En Décembre 2021, un mois de salaire brut : 174h * 12,68 € = 2 206,32 €.

Voici un tableau des restes à charge qui auraient dû être cagnottés chaque année pour anticiper cette dépense :
PériodeCalculReste à charge
01/01/2014 au 01/01/20150,25 * 2 206,32 €551,58 €
01/01/2015 au 01/01/20160,25 * 2 206,32 €551,58 €
01/01/2016 au 01/01/20170,25 * 2 206,32 €551,58 €
01/01/2017 au 01/01/20180,25 * 2 206,32 €551,58 €
01/01/2018 au 01/01/20190,25 * 2 206,32 €551,58 €
01/01/2019 au 01/01/20200,25 * 2 206,32 €551,58 €
01/01/2020 au 01/01/20210,25 * 2 206,32 €551,58 €
01/01/2021 au 01/01/20220,25 * 2 206,32 €551,58 €
TOTAL2 * 2 206,32 €4 412,64 €
Tableau récapitulatif des restes à charge qui auraient dû être cagnottés

Les restes à charge accumulés sur chaque période n’ont pas été dépensés… La dépense a été ponctuelle au moment du licenciement. Cette indemnité n’en reste pas moins un reste à charge non considéré.

Bien évidemment sur des cas plus extrêmes, comme par exemple le licenciement de l’ensemble des salariés pour motif de décès de l’employeur, les montants peuvent être astronomiques.

Mais ils n’en restent pas moins anticipables, du moins en partie. La démonstration précédente en est la preuve !

Ce calcul des restes à charge peut-être extrapolé à l’intégralité des heures du département. Ceci dans le but de prévoir les budgets. Néanmoins, le défaut de cette démonstration c’est qu’elle part du principe que chaque embauche entraîne une indemnité de licenciement. Or en cas de démission il n’y en a pas par exemple! Ceci dit, qui peut le plus peut le moins… En d’autres termes, s’il y a une démission, le budget prévu ne sera pas utilisé mais permettrait de prévoir des cas non prévus (comme la double indemnité en cas d’inaptitude au travail). Par conséquent, il y aurait un équilibre malgré tout.

Le calcul des restes à charge accumulés et dépensés en une fois pourrait être amélioré par des formules de projection basées sur des données statistiques et historiques. Nous sommes bien évidemment disponibles pour y réfléchir avec vous !