Rencontre avec le cabinet de Mme Sophie CLUZEL

Madame Véronique HAMMERER organise une rencontre entre La RERL et le cabinet de Madame la Ministre dédiée au handicap Sophie CLUZEL afin d’évoquer la Prestation Compensatrice du Handicap (PCH). Nous présentons à nouveau la problématique des nombreux restes à charge non considérés par la PCH, notamment pour les employeurs particuliers en situation de handicap. Comment le gouvernement en tient-il compte ? Quelles mesures peuvent être prises ?

Présents :

Vers une réforme de la PCH

Madame HAMMERER introduit la rencontre en soulignant la volonté du ministère et des députés de faire évoluer la question de la PCH pour la rendre plus équitable. Monsieur LE BAYON nous informe d’ailleurs que la PCH faisait déjà l’objet d’une étude dans le cadre du projet de loi financement de la sécurité sociale 2022, ce qui a conduit à une revalorisation du tarif horaire pour les services prestataires. La CNCPH est donc en charge d’une réflexion globale sur cette prestation.

Monsieur Alex M. S. fait un état des lieux de la situation en service prestataire, en service mandataire et en emploi direct. Les problématiques évoquées au cours de sa présentation sont illustrées par quelques témoignages concrets de personnes présentes lors de cette rencontre.

Madame HAMMERER et Monsieur LE BAYON se disent sensibles aux problématiques évoquées par La RERL et s’engagent à porter ce projet de transformation de la PCH. Néanmoins, ils nous informent et nous rappellent tout au long de cette entrevue que le budget du PLFSS 2022, vient d’être voté.

Monsieur LE BAYON nous fait état de l’avancée de leur travail de réflexion globale autour de la question de la PCH. Ce travail a commencé il y a 3 ans et a pour but de faire diminuer les restes à charge en mobilisant davantage la sécurité sociale. Ils souhaitent pouvoir fournir « une feuille de route » au gouvernement qui succédera dans le but d’alimenter la réflexion pour le PLFSS 2023.

Ils souhaitent également sensibiliser les conseils départementaux sur la réalité de la PCH, dont le volet « aide humaine » dans le cadre de l’emploi direct.

État des lieux de la PCH

Le financement de la PCH
Actuellement l’état finance entre 30% et 40% de la prestation de compensation du handicap, le reste étant à la charge des départements. La PCH est donc une compétence des départements et principalement financée par eux. Cela expliquerait toute la complexité du système.
Monsieur LE BAYON entend tout à fait l’intérêt financier qu’il y a à prendre en charge ces frais supplémentaires, dans la mesure où les services prestataires coûtent plus chers et cet argument aurait été présenté aux départements.

Pour Monsieur LE BAYON, il ne devrait pas y avoir de différence tarifaire entre les différentes modalités de l’aide humaine.

Les surcoûts de l’emploi l’emploi direct
Monsieur LE BAYON affirme avoir pris la mesure des difficultés financières liées à l’emploi direct. De même, il sait que la nouvelle convention collective viendra ajouter des frais supplémentaires aux particuliers employeurs. Monsieur LE BAYON affirme que ce sujet devait être retravaillé en urgence, mais que les départements n’ont pas donné leur accord pour avancer sur cette question. En effet  l’augmentation de la tarification de la PCH est soumise à l’accord des départements puisqu’ils en ont aussi la charge financière.

Madame M. Jenny interroge alors la question de l’attractivité des postes chez les particuliers employeurs dans la mesure où la nouvelle convention collective ne pourra pas être respectée faute de budget.

Un sujet d’attractivité du métier d’aide à domicile
Monsieur LE BAYON confirme en effet la baisse d’attractivité des métiers de l’aide à domicile et plus globalement, de l’ensemble des métiers d’accompagnement. Selon lui, il y aurait deux axes de travail pour améliorer cette attractivité :
  • Une revalorisation salariale
  • Un changement du fonctionnement managérial

Des propositions autour de l’aide à la personne

Une revalorisation salariale
Monsieur LE BAYON souligne l’importance  de la revalorisation  par l’augmentation du salaire, ce qui permettrait aussi de fidéliser les salarié.e.s.

Selon lui un tarif à 22 € serait garant d’un bon niveau de qualité de prestation et d’une attractivité du métier d’aide à domicile.

Pour rebondir sur les problématiques présentées par Monsieur Alex M. S., Monsieur LE BAYON met en avant les nouvelles tarifications prévues dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, à savoir un tarif planché à 22 € auquel s’ajoutera 3 € de « dotation qualité ». Ces 3 €, financés par l’État seraient garants d’une qualité de prestation supérieure et permettrait à l’état de poser ses conditions et objectifs. Ces conditions de qualité seraient à la fois techniques, comme l’augmentation de la couverture horaire ou l’augmentation de la zone géographique des interventions, mais aussi des conditions de qualité d’accompagnement. Monsieur LE BAYON réaffirme l’importance de la liberté de choix des différentes modalités de l’aide humaine. Le niveau de qualité de prestation doit être garanti peu importe ce choix.

De nouvelles conditions managériales dans les services prestataires
Au-delà de la question de  la rémunération, il y a aussi eu des propositions faites quant aux conditions de management des services prestataires. Le ministère souhaite en effet donner plus de responsabilités aux salariés en les rendant plus autonomes dans leurs prestations.

Monsieur LE BAYON met alors en avant la nécessité de mettre fin au minutage des actes, encore pratiqué dans certains services prestataires et selon lui, justifié par la manière dont le plan d’aide est évalué.

Ce modèle, inspiré d’un modèle scandinave, aurait déjà été expérimenté dans deux ou trois départements.  Le bilan serait positif, puisqu’il semble  qu’en remettant le management de proximité sans les conditions d’autorité, en laissant les salarié.e.s plus autonomes dans la gestion de leur planning, la qualité d’accompagnement serait meilleure.

Monsieur Alex M. S. interroge Monsieur LE BAYON sur la place des bénéficiaires dans ce nouveau fonctionnement managérial, ce dispositif étant principalement centré sur les salarié.e.s.
A cette question, Monsieur LE BAYON répond que les salarié.e.s de l’aide à domicile choisissent ce métier par vocation, ce qui serait garant de l’investissement au travail et donc de la qualité de prestation.
Monsieur Alex M. S. précise alors sa question en interrogeant la prise en compte du planning du bénéficiaire dans ce fonctionnement d’autogestion des plannings des salarié.e.s.
Madame HAMMERER précise alors que l’objectif est de réduire les distances kilométriques et les coupures entre deux interventions. Les services prestataires fonctionneraient par Pôles afin de donner plus d’autonomie aux salarié.e.s, cela en tenant compte de la vie quotidienne des bénéficiaires.
Cette nouvelle forme de travail et de management autogéré permettrait d’éviter les temps partiels subis et le minutage des actes.
Madame Jenny M. interroge à nouveau la place du bénéficiaire dans ce nouveau fonctionnement.
Madame HAMMERER précise que ce dispositif concerne les services prestataires.
Madame Jenny M. expose alors la difficulté des services prestataires à prendre en compte l’avis du bénéficiaire dans leur fonctionnement actuel.
Madame HAMMERER assure alors que les demandes du bénéficiaire seraient prises en compte, que cela est une évidence dans la mesure où c’est un métier « que l’on fait pour le bénéficiaire et non pour soi ».
Madame Jenny M. rappelle que cette représentation est théorique, mais que la réalité est parfois tout autre.

Madame HAMMERER réaffirme que l’investissement au travail pourrait passer par la revalorisation salariale, la réorganisation du travail ainsi que la formation.

Une PCH spécifique aux surcoûts pour les particuliers employeurs ?
Madame HAMMERER insiste sur la nécessité de travailler en collaboration avec les départements et l’association des départements de France.
Elle prend alors l’exemple du travail entrepris pour la revalorisation salariale des aides à domicile. Ce travail a été long, mais l’état avait pu négocier en faveur de cette revalorisation.
Madame HAMMERER invite donc La RERL à  mobiliser les collectivités locales afin que nous puissions travailler ensemble, avec les départements et les législateurs, à l’évolution de cette PCH et que le projet soit porté en 2022.
Monsieur Alex M. S. rappelle alors que le collectif avait déjà sollicité le département qui a répondu qu’il fallait  légiférer sur la question car selon eux, ils ne font qu’appliquer la loi.

Madame HAMMERER rappelle qu’il s’agit d’une compétence départementale et que le gouvernement ne peut pas se substituer. Elle évoque l’idée d’un fond de compensation départemental  qui aiderait à financer ces coûts supplémentaires dans le cadre de l’emploi direct. Il y aurait donc un gros travail de négociation à réaliser entre l’État et les départements comme cela avait pu se faire pour la revalorisation des aides à domicile.

Le ministère souhaite proposer une PCH aide humaine spécifique aux surcoûts de l’emploi direct. Cette PCH viendrait donc couvrir les frais exceptionnels de l’employeur, tels que les frais de licenciement, les visites de médecine du travail, etc… Ainsi, sur justificatif le « volet indemnitaire supplémentaire » pourrait être déclenché.  Néanmoins, il faut  l’accord des départements  et de l’Association des Départements de France pour mettre en place ce type de prestation supplémentaire et la négociation semble complexe. Il faut qu’ils prennent part à leur charge car cela reste de leur compétence.

Le rôle de la CNSA dans l’évaluation des besoins en aide humaine

Le ministère souhaite aller plus loin, vers une équité de traitement sur l’ensemble du territoire. Monsieur LE BAYON explique qu’actuellement ce sont des commissions d’attribution des droits, élues localement, qui décident et valident les plans d’aide. Il propose de faire évoluer ce système en mobilisant la CNSA dans ce processus. Elle aurait en charge le contrôle des évaluations et versements de manière plus équitable.

Vers une refonte plus globale de la PCH…
Monsieur LE BAYON  fait état de contours trop rigides de la PCH aide humaine qui ne prendrait en compte que  la vie au domicile de la personne. Il souhaite donc élargir cette question de l’autonomie et permettre un accompagnement de la personne  dans d’autres espaces que le domicile afin que la personne puisse être accompagnée dans tous les pans de sa vie.

Néanmoins à 5 mois de la fin  de ce gouvernement et du fait que le texte budgétaire a déjà été voté, cette « feuille de route » sera « léguée » à la prochaine législature afin de créer  une nouvelle réforme.

Conclusion

Quelles solutions aujourd’hui ?

Monsieur Alex M. S. interroge alors Monsieur LE BAYON  et Madame CONVERS sur les solutions possibles pour les employeurs aujourd’hui confrontés à des restes à charge importants comme  cela a été présenté précédemment. Monsieur LE BAYON  oriente donc vers le département pour ce cas précis, il propose l’idée de mobiliser le fond de compensation départementale. En effet il n’existe pas de dispositif légal pour le moment et il est donc contraint d’appliquer la loi. Madame HAMMERER poursuit alors en proposant de solliciter dans un premier temps le département et dans un second temps la CAF.

Une nouvelle PCH pour le PLFSS 2023 ?
La CNCPH a d’ailleurs été saisie sur le sujet spécifique de la PCH et une motion a été votée pour l’emploi direct. Les travaux menés par la CNCPH devraient permettre d’aboutir à une meilleure compensation. Il souhaite « un module spécifique » d’ores et déjà demandé à la DGCS et à la direction générale du travail afin de discuter de certains sujets (droits, congés payés…). Il souligne la nécessité d’articuler les différents systèmes, une articulation entre le droit du travail et le montant de la PCH.

Le cabinet de la ministre sera en mesure de faire un état des lieux en février. La CNCPH rendra également un rapport. Le cabinet souhaite que ce dossier, porté par la DGCS, soit prioritaire. Le sujet de l’emploi direct devrait en faire partie.

Monsieur Alex M. S. rappelle que le collectif se met à la disposition des différents acteurs pour collaborer dans le cadre de ce travail. Monsieur LE BAYON propose ainsi au collectif de participer aux différents groupes de travail déjà mis en place avec les différentes organisations représentatives au niveau national.


Perspectives

  • La République en Roues Libres :
  • Contacter Monsieur Jean-François EGRON, Conseiller Départemental de la Gironde et vice-président de la commission handicap
  • Solliciter l’Association des Départements de France pour les sensibiliser aux problématiques de la PCH et des restes à charge du particulier employeur
  • Poursuivre la campagne de sensibilisation auprès d’élus locaux et des autres départements de France
  • Monsieur Maëlig LE BAYON :
  • Intégrer La RERL aux différents groupes de travail déjà mis en place